La co-recherche en temps de confinement: 3 projets co-create en parlent
La situation sanitaire liée au Covid-19 incite de nombreuses personnes et institutions à se pencher sur de possibles changements dans les comportements individuels ou les choix sociétaux. La communauté Co-create, dans sa recherche d’une plus grande résilience urbaine, nous semble avoir une place à prendre dans cette réflexion collective. La résilience urbaine est, selon nous, la capacité des personnes, communautés, institutions, entreprises et systèmes au sein d’une ville à survivre et se développer malgré les bouleversements chroniques et les crises qu’ils subissent. Cette ville en recherche de résilience serait une ville qui est, aussi, capable de rendre ses citoyens acteurs, développant une compréhension et une appropriation des enjeux, y compris socio-techniques.
La co-recherche en temps de confinement vue par le projet Man’Aige
Héraclite le disait déjà il y a plus de 2000 ans « rien n’est permanent, sauf le changement ». Notre société est en changement permanent et il semble même à certains que la fréquence des changements s’accélère. La co-recherche, l’implication citoyenne accroissent nos compétences pour affronter les changements de manière positive, construire la résilience en incorporant le changement pour s’en faire un ami. A notre petite échelle de deux quartiers de Bruxelles, notre projet Co-Create MaN’Aige en est le témoin direct. Le projet consiste à répondre ensemble avec les acteurs (habitants et usagers) du quartier à la question de recherche : « comment créer de l’entraide dans un quartier où les habitants sont peu nombreux par rapport à la superficie occupée par les usagers (commerces, institutions, entreprises, ….) ? ». Les deux quartiers en question se trouvent à 1000 Bruxelles : Martyrs et ND aux Neiges.
Covid-19 s’est invité dans notre projet et en est devenu acteur. La notion d’entraide revêt une autre dimension à l’heure où les plateformes de soutien émergent partout à Bruxelles. Nous aussi nous avons agi pour faire le lien entre la demande et l’offre d’assistance mais sans plateforme virtuelle afin d’être le plus inclusif possible. On constate (comme de nombreuses plateformes) que l’offre dépasse la demande. Il n’est donc pas si simple de toucher les personnes demanderesses. Les besoins existent mais la confiance est nécessaire pour pouvoir les exprimer : une simple plateforme ou un numéro de téléphone sont des bonnes alternatives mais cela ne suffit pas. Rien ne remplace le lien humain direct et la proximité. Le confinement a mis en évidence à quel point l’entraide dépend des rencontres physiques et de la confiance réciproque. Outre l’impact sur les rencontres elles-mêmes, covid-19 joue aussi un rôle majeur dans la configuration du quartier qui perd (momentanément ?) son caractère atypique (faible nombre d’habitants par rapport aux navetteurs). Avec la fermeture des commerces et restaurants et le télétravail, les navetteurs ont pour la plupart disparu. Covid-19 laissera des stigmates, notamment de nouvelles habitudes de travail. La configuration atypique reviendra-t-elle ? C’est toute la richesse de notre recherche et de nos questionnements. Ainsi, covid-19 nous montre l’importance de l’entraide mais aussi la valeur de toute initiative qui accroît la résilience de tout un chacun pour absorber, voire même rebondir sur, les crises.
La co-recherche en temps de confinement vue par le projet ValueBugs
Est-ce que notre question de recherche et nos dispositifs de recherche évoluent à cause de la crise sanitaire et si oui, comment ?
Depuis le début, notre recherche ValueBugs se construit et évolue au fil des nombreux ateliers réalisés avec les citoyens-chercheurs. En cette période de confinement, il n’y a évidemment pas lieu d’organiser ces rencontres en présentiel. Mais pour garder la belle dynamique de co-création de ValueBugs, nous nous sommes ré-organisés afin de continuer à travailler ensemble. Avec l’aide de moyens technologiques tels que des vidéoconférences, des sondages en ligne et des documents partagés, nous continuons à garder le contact avec les citoyens-chercheurs.
Des ateliers virtuels sont programmés pour les semaines à venir. Ca n’aura pas le même charme que nos rencontres habituelles mais les participants sont motivés et c’est le principal ! Le virtuel prend donc le pas sur le présentiel mais c’est temporaire et nous le savons. Ce n’est que pour mieux se retrouver par après.
Nous entamons les 8 derniers mois du projet ValueBugs, c’est le moment de se poser, d’analyser les résultats et de compiler tout cela ensemble sous forme de livrables (écrit, oral, vidéo, etc.). Ce temps de confinement est donc plutôt propice à cette étape du projet.
www.cocreate.brussels/valuebugs
La co-recherche en temps de confinement vue par le projet VILCO
Pendant 3 ans, VILCO a étudié « Comment améliorer la collaboration entre initiatives citoyennes et pouvoirs publics dans l’optique d’une ville plus résiliente ?». Beaucoup de moments de rencontre, d’échanges et de cocréation ont vu le jour dans l’objectif de repenser les relations, établir la confiance entre des acteurs et instaurer une culture de la collaboration.
Personne n’aurait pu imaginer qu’une pandémie s’installe, modifiant notre quotidien. Vu le contexte que nous vivons, VILCO a proposé à ses membres de discuter, lors d’un apéro virtuel, du rôle de la collaboration dans la gestion de la crise et du potentiel de notre recherche dans un mode post-Covid. Peu de membres ont pu participer à la rencontre. En conséquence, les éléments mis en exergue par ce texte ne nous permettent pas d’avoir des pistes et éléments de réponses représentant les interactions actuelles.
Nous constatons, par les témoignages des participants, qu’il est peut-être trop tôt pour analyser la situation. Dans certaines communes des initiatives citoyennes se mettent au service de la crise en apportant leur aide. Dans d’autres cette aide n’est pas intégrée par les services communaux, qui préfèrent, peut-être dans un souci d’efficacité et rapidité de réaction, avancer de manière autonome, en ne comptant que sur les ressources internes.
Indéniablement, la participation requiert du temps. Et dans une situation telle que celle que nous vivons, il est demandé une rapidité de décisions et d’actions. Est-ce que la participation et la collaboration a-t-elle sa place même en période de crise ? Est-il légitime d’outrepasser les pratiques de démocratie locale au nom de l’ « urgence » de prendre des décisions ?
Il nous semble difficile à ce stade de comprendre si le travail de recherche-action autour de la collaboration joue un rôle dans la gestion de crise, car très peu d’informations sont disponibles et, car nous sommes occupés à redessiner un nouveau quotidien et répondre à de nouveaux besoins.
Cependant, nous sommes convaincus que la collaboration entre ces acteurs peut apporter une grande valeur ajoutée à la gestion de crise. Nous espérons que les acquis de VILCO puissent aider les Living Lab, ainsi que d’autres acteurs lors de la « reconstruction », qui elle sera de longue haleine.
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